L'affaire du lait contaminé a commencé en faisant peu de bruit… Le samedi 2 décembre, le ministère de l'Économie et des finances annonce le rappel de laits infantiles Lactalis susceptibles d’être contaminés par des salmonelles.
Mais le problème n'a fait que prendre de l'ampleur au fil des semaines avec de nouveaux cas de contamination sur de nouveaux produits du groupe Lactalis : en plus des laits infantiles, sont concernés des céréales pour enfants, des compléments nutritionnels ou de la poudre de lait destinée aux industriels ou aux consommateurs.
720 lots sont affectés, puis finalement c'est l'ensemble de la production de l’usine de Craon, dans la Mayenne, qui doit être rappelée. Les volumes concernés par le retrait sont démesurés : autour de 20 000 tonnes de produits, soit plus de 12 millions de boîtes de lait infantile, dans 83 pays.
En ce début d'année, on recense en France trente-sept nourrissons de moins de 6 mois atteints de salmonellose.
Les contrôles effectués ont permis de retrouver des boîtes de lait potentiellement contaminées dans des supermarchés, mais aussi dans des pharmacies, des crèches et des hôpitaux.
Des plaintes contre le groupe Lactalis
Une centaine de plaintes ont été déposées par des parents de nourrissons dans toute la France contre le leader mondial des produits laitiers.
Une enquête préliminaire a été ouverte par le pôle santé publique du parquet de Paris notamment pour « blessures involontaires » et « mise en danger de la vie d’autrui ».
Manque de dialogue et de transparence
Emmanuel Besnier, PDG du groupe Lactalis a été absent et muet depuis le début de l'affaire et n'a donné aucune informations sur les causes possibles de la contamination à la salmonelle.
Après sa convocation par le ministre de l'Économie, Brune Le Maire, le PDG sort enfin de son silence et se dit « assumer ses responsabilités » . Il se défend de tout manquement et promet d'indemniser toutes les familles qui ont subi un préjudice.
Mais ces excuses risquent de ne pas être suffisantes et pour le porte-parole du gouvernement, « l’argent n’achète pas tout ».
La grande distribution n'est pas écartée
Le dispositif de retrait de marchandise est assez fréquent dans la grande distribution et en théorie, assez rodé avec 100% des produits enlevés des rayons dans les 24 heures.
La décision de retirer des lots est communiquée par le groupe et le gouvernement français aux différentes enseignes, qui relaient l'information dans chacune de leurs centrales, puis de la direction des magasins qui doivent ensuite communiquer en interne auprès de leur équipes. Les produits sont finalement détruits ou mis de côté.
Le scandale des laits contaminés ne se limite donc pas à la production, il s'étend aux grands groupes de distribution car malgré le rappel, des lots contaminés ont été vendus en magasin.
Leclerc a été le premier à annoncer avoir retrouvé dans ses circuits de distribution et vendu des produits non autorisés à la vente. Puis les autres enseignes comme Carrefour, Auchan, Système U, Monoprix, Cora reconnaissent à leur tour avoir vendu des produits interdits...
Tous ces groupes communiquent abondamment et ne manquent jamais de vanter le sérieux de leurs procédures, normes, chartes qualité et autres systèmes de contrôle, or dans les faits, rien n'est de tel.
Le ministre de l'Économie, Bruno Le Maire, juge que c'est un « dysfonctionnement majeur » et a convoqué les acteurs de la grande distribution pour leur rappeler leurs devoirs car le fait de ne pas retirer des lots incriminés pouvait constituer « une infraction pénale ». La Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF) supervise de son côté le rappel et le retrait de produits.
Cela prouve qu'avec des circuits de distribution ayant un trop grand nombre d'intermédiaires, des erreurs graves sont commises à cause d'une communication plus complexe et surtout plus lente. Des parents vont également porter plainte contre ces chaînes de distribution.
L'État lui aussi mis en cause
L'État lui aussi engagé dans l'affaire par manque de contrôle car des lots contaminés étaient toujours disponibles dans des hôpitaux et des crèches après le rappel.
Un climat encore plus pensant pour les producteurs de lait
Les éleveurs laitiers craignent de voir les prix d'achat du lait partir à la baisse et d'être la « virgule d'ajustement » de Lactalis car c'est le producteur basique qui va payer l'addition.
La plupart ont peur que « si le groupe Lactalis sent que ses bénéfices sont un peu moins intéressants, il paiera le lait un peu moins cher et les producteurs n'auront rien à dire ». Les relations commerciales et les négociations entre le groupe et ses fournisseurs ont la réputation d'être tendues et inégales.
Le PDG de Lactalis a promis qu’il n’y aura pas de répercussions sur le prix du lait aux producteurs car selon ses dires : « ce n’est pas un problème dans l’élevage ou la livraison de lait, c’est un accident industriel dans l’entreprise. Nous avons eu la confirmation que la responsabilité des producteurs est complètement écartée »
On recherche toujours la cause de la contamination
Le groupe Lactalis chercherait en ce moment à déterminer les causes et la provenance des salmonelles.
Parce qu’elle met en cause la santé de nourrissons, l'affaire Lactalis suscite beaucoup de réactions et de doutes auprès des consommateurs. Ce scandale, qui est une crise sanitaire supplémentaire, doit être l'occasion de mettre en cause globalement les pratiques du système de production et de distribution agroalimentaire. Les nombreuses crises alimentaires connues ces dernières décennies témoignent de l'opacité des circuits, voire de fraude délibérée.
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